Lhistoire
des civilisations est une lutte pour des droits. Lapplication
des droits acquis se confronte à la valeur déchange
attribuée aux produits de lactivité économique
et des services de lactivité sociale. Ce marché
constitue un jeu dont la règle est maligne et larbitrage
une fausse démocratie. Tous les rapports existentiels
se soumettent, en effet, à cette convention empirique
dite loi de la valeur, ne reposant de force et par
intérêt que sur des quantités abstraites
de travail, dargent, de suffrages.
Maintenant, linfernal jeu marchand
brûle lesprit des hommes. A quoi sert, en cette fournaise
rentabiliste, compétitive, le droit formel au travail,
quand le mode de production et des échanges existants
ne permet pas de le satisfaire socialement ? A quoi sert le droit
formel dexpression, quand la démocratie en vigueur
ne permet pas de le satisfaire individuellement ? Il sagit
de labsence totale de garantie demploi et du pouvoir
effectif de communication des simples citoyens.
Les droits de lhomme daujourdhui
sont pleinement assujettis à lubiquité dune
valeur archaïque. Cette valeur marchande perdure dans lintérêt
de privilégiés de la richesse vénale et
dun pouvoir politique de classe. Quel quen soit dailleurs
le parti qui dirige ou le genre de sophisme qui le guide. Partout
sous dirigisme et par suivisme, de droite à gauche, tout
le monde se croit en démocratie, mais ce nest que
lantichambre dun capitalisme rendu totalitaire. Alors,
adepte de ce mythe moderne, chacun vote pour des remèdes
qui ne font que perpétuer du mal.
Lhistoire des hommes exigera
demain un combat en vue de la constitution de valeurs idéales
pour léconomie et pour la démocratie; et
ces valeurs impliqueront encore une autre épreuve, de
revendication simultanée : la lutte pour la constitution
dune raison impersonnelle capable de mettre
un frein aux jeux dorgueil de lindividu, aux rapports
dintérêts personnels, dont le procès
bourgeoisement démocratisé aura seulement servi
à conquérir délémentaires droits
formels. Lhumanité, alors peut-être, pourra
saffirmer sous légide du droit, de la valeur,
de la raison, existentiellement applicables, en un splendide
bouquet de liberté authentique. Pas avant.
Mais supposons, que ces fleurs-là
semées, elles ne trouvent pas leur condition de champ
fertile, ou nullement la rapidité déclosion
voulue sur une terre trop tassée par un surnombre de pieds
: les graines ne germeront même pas.
Or il se fait tard et les grands nombres
- individus qui arrivent, heures de travail qui partent, voix
qui sen moquent, objets qui encombrent - s'accroissent
terriblement en ce sens.
Il faut faire vite...
A la table des affaires,
des marchands discutent gravement. Leur sérieux dissimule
le jeu. Ils vendent et achètent, sachant pertinemment
quil y a gagnant et perdant. Pas besoin de discours. Ils
avancent le bras, tendent la main, signent. Le vendeur se place
en tête dans la compétition; lacheteur, juste
derrière, se rattrape ailleurs, étant gagnant sur
dautres concurrents en double file dattente.
Tous ces affairistes gagnent ensemble
sur le salariat dont le nom même désigne d'immuables
perdants, car en-deçà de la force de travail il
n'y a plus rien, sinon la machine à côté
d'elle. L'on joue ainsi entre gens de bonne compagnie et les
gains sont toujours remis en jeu pour exploiter le travail salarial.
L'Etat y participe jusqu'au cou, pas
au-dessus. Ce sont les grosses entreprises transnationales qui
décident du monde. Un Etat est simplement dans le coup,
en mettant tous les salariés en boîte, selon la
même règle qui sied aux marchandises. Le traitement
direct des esprits est devenu inutile. Le traitement moderne
des consciences dispose de la technologie médiatique,
est assuré d'une parfaite conjuration entre gens d'affaires
et politiciens, au moyen de la presse et de la télévision,
moyennant rémunération garantissant l'aliénation
journalistique. Ces instruments d'émulation de la prébende
actionnaire et de l'ordre salarial succèdent au prosélytisme
religieux avec de faux airs de liberté. Pire qu'en l'ordre
ancien, toute matière grise qui entre en cette école
ne répète qu'une leçon, n'en sort que bêtement
compétitive.
L'Etat se garde donc de réclamer
une éthique économique pour les employeurs, les
industriels, les marchands, d'autant qu'il fait le principal
percepteur d'argent du travail social. Partant de la corvée
du temps des rois à l'impôt sur salaire de nos jours,
l'on en est arrivé à ce que l'argent insensible
se substitue à un labeur resté par trop sensible.
Le féodalisme continue de la sorte, s'aggrave dans l'insidieux
par la grâce d'une métamorphose salariale et fiscale.
Que ce soit pour le respect du minimum de droits, le maintien
de la civilité bien pensante, l'égalité
dans la cité des nouveaux riches, un tel Etat ne peut
jamais se prétendre exemplaire et sévir intègre
avec police, justice, prison, etc. Sa législation au complet,
conventionnée y comprise, n'ose toucher à la règle
de jeu d'un marché devenu totalitaire, corrompant partout
l'homme, le rendant légalement mafieux, et au nom duquel
l'on signe à toute table.
Aussi la prétendue "loi
du marché" qui opère en ce jeu n'a, en fait,
rien de naturel ni de normal. Elle échappe d'ailleurs
à la logique telle celle des élections, où
chacun est obligé de vendre sa tête emportée
sous le bras. Peu revient à partir d'un droit, même
si durement acquis, ne restant que formellement énoncé.
Les salariés doivent le plus souvent recourir à
la "manif", à la grève, ou à pire,
ne serait-ce que pour avoir accès à la table de
jeu. Si encore, quand pourvus d'intelligence, ils pouvaient faire
l'économie de ces éternels rapports de forces...Impossible,
même quand munis de savoir, ils allaient vers plus de démocratie
par cette marche librement contrainte. Encore impossible, car
la jungle en laquelle continuent de vivre les hommes est maintenant
devenue ludique. Tout cela explique comment ils n'arrivent toujours
pas à réaliser ni grande ni petite chose à
l'unanimité et sans victimes. Mais plus personne ne se
demande pourquoi.
Alors impossible de repérer
en des têtes ce qu'elles font en leurs cités, de
voir comment toute gratification s'achète et à
quel prix toute sanction se vend. De nos jours, qui n'a point
son bouc- émissaire, son...immigré responsable
du chômage qui, du reste, ne touche pas plus son voisin
que soi-même ? Il est vain de faire la psychanalyse des
sujets typiques d'une économie de marché à
l'âge d'aller travailler. Chacun doit alors gagner sa vie,
par tous les moyens en jeu, avec la mauvaise foi, la logorrhée,
la jalousie bien dissimulée ou l'envie ostensiblement
affichée. C'est la perdre, cette vie, pour de l'argent
travesti en paroles intéressées.
Un tel traitement livre les salariés
au même sort réservé à leurs objets
de production. Ne pouvant rien dire, les animaux domestiques
sont voués à la boucherie; mais les salariés
tiennent pourtant un langage et n'ont pas non plus la parole.
Quand la sotte de poule s'égosille à signaler à
son maître qu'elle a pondu et que le coq se tord le cou
pour lui rappeler ce devoir, en remerciement pour cette générosité
gratuite, on les enferme par millions, industrialisant leur espace
vital. De plus, l'emballage bien présenté fait
croire que la qualité de l'oeuf se trouve sous une coquille
lavée, que la saveur de la chair est en sa blancheur;
le client ne le désire-t-il pas ? Bêtes, objets,
êtres humains, toutes marchandises qui rapportent.
Le réflexe conditionnel de consommation
étant devenu déterminant, l'on est arrivé
à faire admettre que le nombre de bouches à nourrir
implique un traitement de vache, que la réalisation d'un
bénéfice légitime une surproduction de veaux
- revenu que les producteurs d'hier obtenaient pourtant avec
moins de bêtes qu'aujourd'hui, aux deux bouts de la chaîne.
Et c'est ainsi que l'on exploite la crédule inconscience,
sans plus de scrupules qu'envers la volaille. Tout est traité
à la même enseigne, en grand, ainsi que forêts
qui se rasent tels des poils, laissant collines de cailloux.
Puis le sol se reboise d'arbres d'espèce unique, à
rendement rapide, sans souci des valeurs environnantes. Pour
en arriver là, il faut bien que précède
une industrie de tuteurs taillés sur le même gabarit,
une standardisation de profession, que des individus soient sélectionnés
compatibles, en tous points identiques à des chevaux de
course, à des porcs engraissés, à ces poulets
déplumés, à ces futaies débranchées.
Il faut bien, aussi, que des techniciens se croient branchés...
Quand le produit prend la valeur du
travail comme l'ennemi prend nom d'adversaire, ou le capital.....celui
de capitaine d'entreprise, n'y a-t-il pas en fait échange
par altérité, substitut d'identité ?
Comment un marché peut-il se
faire juge de l'authenticité ? Pratiquer ce jeu en grand,
par tous les monts, ne détourne-t-il pas la raison ? Si
la logique est rendue autre dans la conscience, alors les vessies
redeviennent vraiment des lanternes, non ? Le marché et
sa démocratie, ensemble, en sont effectivement là
! C'est tromper et se tromper, ruser avec la sortie du raisonnement,
jouer de l'information qui entre, comme face à un jeu
d'échecs étendu sur une table grande comme le monde.
Les passes se portent sur les salariés, cette multitude
de pions...
Lorsqu'une démocratie réalise
le supermarché des sujets qui consomment au marché
des objets, cela permet l'élection licite de sourciers
(chercheurs de source) auxquels l'on a pu inculquer une règle
si maligne qu'elle peut s'appliquer sans être comprise
et mener le monde d'une baguette magique. Quand pions et joueurs
sont consubstantiels d'un jeu, il devient de règle de
ne pas connaître de règle, pas même dans le
haut monde qui risquerait de ne plus tourner si elle était
explicite de par la raison, en partenaire du bas monde.
Mais où se dissimule donc cette
règle ? Où trouver ce lieu ? N'est-ce pas en la
valeur marchande que l'on confère depuis toujours à
la production du travail dédoublée en argent ?
Et quoique cette production arrive à ne plus supporter
cette valeur-là, à la chasser de son intérêt,
depuis que le travail utile qui la réalise rapporte de
moins en moins à l'unité de production et qu'un
travail parasitaire, c'est-à-dire inutile, se doit de
rapporter à sa place, et qui tient à une manipulation
spéculative de la production de cet argent, c'est-à-dire
à sa reproduction à part. Ce profit injustifié
peut en effet se tirer directement de l'argent, en dehors d'un
profit apparemment justifié tiré du travail ou/et
en complément.
La valeur marchande en question pose
alors un problème sans solution, apporte un intérêt
sans raison, remplace un vrai besoin par une fausse motivation,
forme un jeu qui masque sa règle ! Une règle de
jeu maligne...
La règle se découvre
dans l'ordre de ces propositions officiellement inusitées,
sinon proscrites, voire ainsi largement ignorées ou inconnues,
en tout cas méconnues :
Valeur, prix et, par extension, pouvoir,
disposent d'une commune unité abstraite à la fois
de mesure et de formation qui se caractérise en ce qu'elle
fait un quantum.
La valeur se détermine par un
quantité concurrentielle de travail social.
Le prix se détermine par une
quantité d'offres de vente conditionnée par une
quantité de demandes d'achat.
Le pouvoir se détermine par
une quantité majoritaire de suffrages électoraux.
Dans le fond, en réalité,
la valeur est restée centrale; le prix et le pouvoir sont
devenus marginaux.
Dans la forme, d'apparence, le prix
s'est aujourd'hui substitué à la valeur, comme
le pouvoir s'est substitué à un suffrage.
Un prix est supposé exprimer
la valeur en la remplaçant (Ce qui ne constitue pas une
transformation).
De même, un élu est supposé
représenter une majorité de voix, alors qu'il dispose
du pouvoir d'agir sans leur consultation et, partant, envers
celles qui ne l'ont pas élu.
Une valeur qui reste
donc essentielle est recouverte, éclipsée par un
prix devenu capital. Le prix traduit, en fin de compte, la valeur
sous le signe de l'argent.
Un suffrage de grand nombre est occulté
par le pouvoir donné à l'un ou quelques-uns. Le
pouvoir qui représente la masse (une quantité,
un quantum par excellence) s'exerce finalement sous le signe
des mots.
Les quantités abstraites en
jeu sont indifférentes à la qualité concrète
de l'objet d'évaluation, la qualification de l'idée
émise. Le bon ou le meilleur s'identifie à un quantum
issu d'un choix.
Ce qui apparaît le bon ou le
meilleur peut donc s'avérer le pire ou le mauvais. L'instrument
législatif pour éviter cela n'existe pas. La démocratie
est le plâtre qui monumentalise la règle maligne
en question et ne se mouille donc pas !
La règle de ce jeu est alors
la suivante, en trois temps : en terme de valeur, le travail
se substitue au produit; en terme de prix, l'argent se substitue
au travail; en terme de pouvoir, un langage se substitue au besoin.
Maillons d'une chaîne bouclée sur elle-même.
La valeur authentique d'un produit
du travail est omise, usurpée par la valeur du travail
nommée marchande pour un produit nommé marchandise.
Comme le prix désigne la valeur
du produit, comme une demande joue le prix, le tour de passe-passe
fait gagner l'offre, passer le travail sous la table et l'argent
au-dessus. La règle de jeu est donc bien maligne !
La valeur authentique du travail est faussée
comme la valeur authentique de son produit, puisque le travail
est mis en conserve dans son produit pour permettre sa consommation
ultérieure, en un partage différentiel. Le travailleur
n'est alors payé que pour une partie de son travail, sous
la forme d'un salaire; l'autre partie forme une plus-value, prise
par un patron ou/et un Etat.
Le travail, introduit par la règle
maligne en son produit, réalise la marchandise. Ce système
n'est, en fait, que l'épave d'un commerce archaïque,
d'une convention empirique, échouée au vingtième
siècle.
Et la démocratie en vigueur
introduit la règle maligne sur la place publique, là
où règne un langage scripto-politique. Les choses ne sont
pas dites en paroles comme elles le sont dans la réalité.
Le Malin semble dicter la conduite de l'homme.
La quantité de travail employée
à la réalisation d'un produit défini a apparemment
la signification d'une économie, de par la dépense
décroissante du travail en terme d'énergie.
La diminution de ce quantum de travail
est la conséquence du développement constant de
la force de production technique (accroissement et modernisation
des moyens de production) par rapport à la force de travail
manuel. Les robots prolongent des mains, l'informatique supplée
des cerveaux.
Mais cette économie de travail
se traduit en terme de valeur marchande et de capital, de production
d'argent. La dite valeur marchande désigne un produit
en tant que marchandise et qui diffère de sa valeur intrinsèque
de produit, par l'état de dégradation du travail
que ce produit contient en tant que marchandise. Cette prétendue
valeur marchande se trouve en chute relative mais constante et
c'est naturel et juste, puisqu'elle est faussaire de la valeur
réelle du produit (valeur intrinsèque). Le chômage
est notamment l'indice phénoménal de la profondeur
atteinte.
La plus-value (qui est le profit spécifique
d'un temps de travail donné), ou gain pris sur le quantum
de travail nécessaire à la réalisation de
cet état de la valeur marchande, se dégrade avec
celle-ci. Il sagit donc d'une chute absolue de la valeur marchande
intégrant ce bénéfice. La dégradation
en question échappe à la vision, puisqu'il s'agit
d'un processus d'abstraction de la réalité, en
l'occurrence de la mise en arrière-plan de la valeur intrinsèque,
en hors-jeu d'un fait concret.
La réalité physique du
processus de production d'un travail apparaît en métamorphose
: le produit égale la négation du travail, signifie
sa disparition. Voilà le fait en question, non manifestement
évident, malheureusement : la fin du travail dans l'accomplissement
de son produit. Et vient ensuite, après "usage"
du "produit", longtemps après sa "consommation"
(Tous termes qui ne devraient pas être confondus avec les
mots "marchandise", "valeur marchande", "vente",
"achat" "prix", "profit", "rendement",
tous associés à de l'argent), la négation
de la négation, la destruction / digestion de l'objet
consommé.
Cet état dégradé
de la valeur marchande prend sa source en usine, est une conséquence
de la modernisation de l'outil de travail, de la force productive
et qui, quand il a pris un cours, se traduit en baisse de prix
de production. Là commence seulement la "chute du
cours". Car si produire plus avec une moindre quantité
de travail caractérise une productivité qui dégrade
la valeur marchande à l'unité de production en
amont, ceci peut être masqué dans un bon chiffre
d'affaire réalisé en aval, une fois que le prix
de marché a pris le relais de cette valeur marchande établie
à la source.
L'on peut se figurer
cela par un fruit à noyau. La valeur marchande est représentée
par ce noyau, le prix est représenté par le fruit.
Le prix enveloppe et cache cette valeur centrale - à l'image
du fruit. La dégradation de la valeur marchande passe
donc inaperçue, d'autant qu'elle devient toujours plus
petite. Il y a entropie, la dégradation est constante,
la chute irréversible : On n'a jamais vu une valeur marchande
augmenter ! Toute l'entreprise capitaliste se leurre, car l'analyse
des économistes ne considère pas cette notion de
dégradation de la valeur marchande, la confond avec son
expression de prix, autrement dit : n'en voit que le fruit d'un
marché, point le travail au centre. Non seulement le travail
se dissout, objectivement, mais on ne voit pas comment, à
peine pourquoi. (Marx est un peu à l'origine de cette
confusion faite entre valeur et prix, et ce n'est donc pas le
fait d'un état d'esprit purement conservateur - c'est
un état de fait, réel).
Il faut nécessairement savoir
faire la distinction entre travail et marché (spéculatif,
sous entendu), entre valeur (marchande, bien entendu) et prix.
En rapport à la demande, le prix du marché fixé
par l'offre regonfle éventuellement la plus-value qui
est un dividende de la valeur marchande (le bénéfice
d'exploitation du travail); l'autre dividende formant du salaire.
C'est ce que l'on appelle "inflation des prix". S'autorise
également une compensation relative à la dégradation
de la valeur marchande au moyen d'un intérêt exclusivement
financier. Forme de profit qui accompagne la plus-value avec
l'argent en tant que marchandise particulière.
Ce profit accessoire, spécial
au rapport de l'offre à la demande, passant par le prix
et quelque autre manipulation strictement monétaire, prend
ainsi le sens d'une "regradation" relative du rendement
faiblissant de la plus-value qui se dégrade dans l'absolu,
en proportion de cet état de la valeur marchande.
Le jeu financier (de bourse, d'actionnariat,
etc.) forme un artifice particulier complémentaire au
marché spécifique du travail, et ceci précisément
par le rôle de substitut du travail que représente
l'argent.
Le mode de production et d'échange
existant - le capitalisme - et par lequel se dégrade la
valeur marchande qui le fonde, génère une surproduction,
une concurrence de l'offre, qui oblige à une vente consécutive
accrue, puisqu'il y a contradiction entre la dégradation
de la plus-value, d'un profit tiré encore proprement du
travail, et le profit d'un capital se surgénérant
de plus en plus malproprement mais qui "regrade". L'on
est contraint de rattraper à flot d'un cours, au moyen
d'un prix artificiel, la perte subie au fond avec la valeur marchande.
Ce rendement du capital (de l'argent)
en soi, cette auto-reproduction, qui autorise un gain spéculatif,
compense ainsi la perte côté rendement du travail.
Astuce qui permet de conserver au profit de l'ensemble un taux
encore acceptable. Jusqu'à quand ? Jusqu'où peut-on
admettre le licenciement de main-d'oeuvre parce qu'elle ne rapporte
plus suffisamment par elle-seule, et son remplacement par la
génération spontanée de la monnaie (Ou qualifiable
de mouvement perpétuel, car ces termes conviennent malheureusement)
? Le capital est à la fois une production et une reproduction
- non pas une création (Ce dernier terme ne convenant
point à ce sujet).
Le rapport général du
travail au capital se caractérise, dès lors, en
ce qu'il constitue une complexion entropique qui se traduit par
une crise phénoménale de l'économie relativement
propre du travail et de celle absolument malpropre du capital.
Toute valeur marchande
devient nécessairement une fonction d'échange dégradée
du travail, se transmettant à toutes les autres valeurs
de la politique existentielle du monde.
Une observation comparable peut être
faite concernant le pouvoir ou la démocratie politique,
puisque l'on a à faire à une méthode homologue
à celle du marché : la dégradation du suffrage
universel se manifeste en termes d'abstention électorale
(bulletins nuls compris) qui forme un nombre croissant et constant.
Le rapport en jeu est identique à celui qui lie la valeur
marchande au prix. L'inflation du discours est à mettre
en parallèle avec celle des prix. Autant de signes dégradés
de cette fin de millénaire, sur plein d'écrans
révélateurs de l'état de déchéance
de la civilisation marchande.
Est-il besoin d'apporter
une démonstration exhaustive à ce genre de proposition
? Ce n'est plus indispensable depuis qu'abondent de visu les
méfaits d'une économie marchande totalitaire. Le
propos ne se veut pas même, ici, celui de la thèse.Les
références didactiques sont d'ailleurs aussi étrangement
absentes chez les éditorialistes médiatiques, chez
tous ces interfarceurs du capitalisme, de même qu'en l'esprit
de nos "économistes" (rétribués
par le système, et donc à sa solde) qui, eux professionnellement,
économisent leur regard. Ils n'ont point de pensée,
d'intention propre. Ils savent ce qu'ils doivent dire, ou laisser
dire, au point qu'ils n'ont pas besoin de dire ce qu'ils savent.
On ne les consulte même pas, passant ainsi pour incompétents
par veulerie ou en tout cas pour des causeurs impuissants, aux
ordres de financiers tellement puissants....
Et tous demeurent aujourd'hui en la
philosophie qui n'use que d'abstraction, qui met l'ordre d'importance
des choses dans le désordre. Ce n'est pas encore le chaos
mais la banale nécessité de servir quelque employeur
privatisé, sociétés anonymes regroupées,
multinationale francophonisée, Etat européanisé,
certains élus et partis politiques en notre démocratie
gouvernante. Nécessité de servir, simplement
pour ne point déplaire à sa conscience sauvegardée...sur
ordinateur et compte bancaire. Tout normalement.
La nouveauté concrète
est une revendication qui prend en mains des choses, des objets,
des sujets, des faits, et des êtres, non point des marchandises.
Aujourd'hui, la mort
du travail est une métaphore à prendre au mot,
en ces cimetières d'usines démantelées,
en ces crématoires à surplus, sur des terres en
jachère, au creux de mains inactivées.
"C" comme Concept, "T" comme Travail, "P"
comme Produit, "A" comme Argent,
se sont posés sur la table vide, et inoccupée à
l'entour depuis que les marchands sont partis réaliser
le jeu qui consiste à faire "exécuter"
froidement le travail par d'autres pour gagner de l'argent, c'est-à-dire
à le tuer afin qu'il ressuscite d'un capital qui, comme
par génération spontanée, se reproduit aussi
bien mort que vivant.
Ecoutons les objets en cause et qui disent, eux mieux que
personne, comment ils veulent vivre :
C : - Dirigisme et
suivisme marginalisent. Nous sommes seuls.
T : - Invalides de bras,
de mains.
P : - Je sors d'une machine.
A : - Je viens d'une banque.
P : - Produits de tous
les hommes, unissons-nous !
C : - Stoppons le marché.
T : - Ne suivons plus
la démocratie qui fait marcher.
A : - Bourrons les urnes.
P : - Réinventons
le mode des échanges.
T : - Créons une
table à valeur pour une économie de raison.
C : - L'hégémonie
du capital est mondiale, sans partage ni même plus division
du travail. Alors supposons un millier d'Humanites, gens insolites
isolés quelque part (Nom que se donneront ces naufragés
pour se différencier des gens prétendument civilisés
et qu'ils appelleront des Chrématos...) Il leur reste
à peu près tout ce qu'il faut pour entreprendre
une nouvelle vie, par ce que les Chrématos produisirent
en moins d'un siècle, avec cette hâte intéressée
les caractérisant.
T: - Ces Humanites se
mettront à travailler avec probité, respect pour
des générations de salariés qui peinèrent
pour ce développement de biens déménagés.
Ils n'allaient quand même pas recommencer, continuer, la
même existence que celle qui les aura amenés là
!...
P : - D'autant qu'ils
seront pourvus de tout, même d'ordinateurs.
T : - Ils ne voudront
simplement pas reconstituer pour eux, entre eux, la société
marchande des Chrématos. Ils penseront pouvoir surclasser
l'ère de toutes ces civilisations des échanges
malins entre malins, faire disparaître la chrématistique,
ce vice mental des hommes, cause des échecs de toute révolution
sur cette Terre. Les Humanites tenteront de retrouver le paradis
en l'inventant, en jardinant la jungle dans laquelle durent vivre
les êtres humains plus durement encore que plantes et animaux.
Ils ouvriront la porte sur l'ère d'une économie
de raison.
A : - Mais ces exclus
ne disposeront, parmi tous ces biens, et par bonheur, de pas
une seule pièce d'argent. Ceci les amènera à
chercher une autre façon d'échanger une production
et de rémunérer le travail.
C : - Ils chercheront
surtout comment n'avoir nul besoin d'une production de capital,
de cet argent cependant indispensable. Ils ne voudront plus recommencer
la faute originelle...Les Humanites s'emploieront donc à
constituer de l'argent d'office, autant qu'il en faudra, pour
le mettre à sa place de plein droit, sur une table à
la fois commune et personnelle, autour de laquelle chacun pourra
s'asseoir et décider ensemble de son usage.
T : - Ils se remettront
au travail par envie de créer, directement. Non pas, comme
les Chrématos qui font tout par désir d'argent,
avides de s'enrichir en dehors en s'appauvrissant en dedans.
P : - Créer avec
plaisir, autant les choses utilitaires pour se nourrir, s'habiller,
se loger, que celles pour se cultiver, fêter, s'exprimer,
et bien vivre.
C : - Ils n'iront pas
produire en même temps de l'argent par convention chrématistique,
en se pressant de vivre, comme continuent de le faire les Chrématos
attardés à un âge d'homme prélogique
trop court pour bien vivre. Non, les Humanites trouveront une
autre raison de vivre.
A : - L'état d'esprit
du bien vivre, hors conditions du Chrématos obligé
de gagner sa vie pour se procurer un niveau de vie, ne peut pas
reposer sur la richesse en argent. L'acquis de la science donnera
à l'Humanite le pouvoir de vivre la durée d'âge
convenant à des échanges éthiques, non plus
chrématistiques.
T : - Les Humanites sauront
prendre le temps de vivre dignement en êtres humains, ne
cherchant pas à rattraper la mort répandue avec
tant de hâte sur la Terre par les Chrématos.
C : - Débarrassés
des soucis d'un rendement, de la compétitivité
entre entreprises cupides, ils pourront enfin faire honneur à
l'oeuvre de penser, appliquer celle-ci ouvertement pour le bien
et directement pour le beau. Ladite loi de l'offre et de la demande
ne présentera plus de spectacles pour de l'argent. Tant
pis pour tous les menteurs de profession; ils devront s'afficher
comédiens et non plus commerçants. Il restera bien
assez de divertissements, de travestissements, de parodies, de
mises en scène épiques, à recréer.
La civilisation de marché n'aura pas été
télévisée, classée sur disques laser,
gardée du son et de l'image pour seulement être
corrigée. Cet enregistrement du virtuel devra être
effacé dans la vie réelle, ne plus se reproduire
dans la vie-même.
P : - Les produits obtenus
et les services rendus dans la société des Humanites
devront correspondre à un usage ou a un besoin réel.
Toute acquisition inutile devra pouvoir se justifier.
A : - Leur argent n'affichera
pas de valeur marchande ubuesque, de cours fluctuant, de prix
ludique. Il n'est pas un fluide, ni un objet de jeu.
Il prendra une valeur solide car devenue
neutre, dégagée de la tentation mercantile, indépendante
de celle du travail et des produits.
T : - Le travail s'identifiera
valeur abstraite de par sa fonction spécifique : produire
des oeuvres utiles ou d'art, de valeur concrète. Il ne
pourra pas produire par une opération de profit, en plus,
cet argent maudit cher aux Chrématos. La vraie valeur
d'un travail abstrait ne peut que finir dans un ouvrage, une
oeuvre, en laissant une valeur concrète, par un service
ou en un objet.
C : - Les Humanites retourneront
également leurs possessions acquises durant l'ère
des Chrématos, de l'envers formant marchandises de marque
corrompue à leur endroit en qualité de créations,
rétablies à leur valeur authentique d'inventions.
P : - Producteurs et consommateurs
devront étroitement s'associer. Tous les objets de réalisation
artificielle seront considérés au même titre
que les personnes, les animaux, les oeuvres naturelles. Ce qui
ne sera possible que grâce à leur table à
valeur permettant la mise en évidence, l'authentification
des vraies valeurs.
A : - Pour éviter
les conflits d'intérêt, les Humanites signeront
d'abord entre eux un contrat civique, qui figurera en marge de
leur table à valeur. Seule la raison en fera le fondement
et l'interpellation nominale de citoyen sera un honneur, un signe
chargé de sens démocratique - non plus renié
dans le terme de "monsieur".
T : - Au moyen de leur
table à valeur, le travail pourra bénéficier
d'une juste rétribution et son produit être échangé
à un prix stable, tout en restant chacun indépendant
de l'argent. Travail, produit, argent, définis chacun
selon le principe d'identité de la logique, ne pourront
plus se substituer entre eux. Ces trois composants essentiels
de l'économie se rendront libres. Une fois la valeur du
produit affranchie de la valeur du travail, cela permettra la
vente et l'achat contre une valeur en argent tout aussi bien
affranchie.
C : - L'oeuvre d'un travail
devenue produit d'usage, celui-ci affirmera sa valeur propre,
représentative de la négation du travail. La répartition
d'une production circulera à des prix équivalant
à la valeur intrinsèque et qualitative des produits.
La production matérielle concrète libérée
d'une sous production immatérielle abstraite, une productivité
ne sera plus synonyme de rendement parasite, d'ordre quantitatif
financier.
A : - Un capital monétaire
potentiel sera consigné dès le berceau à
chaque citoyen, lui permettant d'entrer sans soucis dans la vie.
Dans ce but, un trésor public d'argent sera institué
en qualité d'unique moyen d'échange abstrait, c'est-à-dire
caduc à l'issu de tout emploi ayant satisfait un objectif
concret. Cet argent servira à la mise en chantier d'oeuvres
diverses, sans obligation de remboursement, ainsi qu'aux différents
échanges de besoins, dans cet ordre de facilité
et d'équité. Il ne sera plus indispensable d'attendre
la fin de sa vie pour pouvoir jouir d'un capital personnalisé.
Il sera d'autant plus interdit de dilapider cet argent au départ
de la vie, car cette procédure impliquera un rendu de
compte d'utilité à la société.
T : - Véritable
bourse du citoyen responsabilisé, ouverte seulement à
la mesure du travail et des besoins personnels, sous haute et
égale responsabilité des autres citoyens. La constitution
de cette monnaie fera l'objet de fichiers personnalisés,
réservés, et protégés, et de cartes
magnétiques codées. Ce capital commun et privé
sera traité sur ordinateurs reliés entre eux, en
vue de justification après dépense, rendu de service,
acquis de biens, paiement de travail.
C : - L'économie
politique aussi se voudra affranchie du marché d'intérêts
horizontaux à concurrence compétitive et des classes
sociales verticalement oppressives. Ceci grâce à
la démocratie gouvernée, d'ordre cybernétique,
plus juste que partant de rapports de forces au sein d'une démocratie
gouvernante. Dissidents de ces politiques ayant institutionnalisé
les lois de la jungle en lois du marché, les Humanites
se réclameront de cette démocratie authentique,
en vertu de laquelle les bonnes issues d'un procès public
pourront se fermer aux mauvaises, du fait des idées toujours
renouvelées apportées par mandat de raison.
A : - De cette façon,
aucune forme de malignité vénale ne trouvera une
utilité, aucun genre de mercantilisme ne pourra opérer.
Le marchandage chrématistique finira là-même
où naît envie de pouvoir, égoïsme par
ambition, dans la tête même des hommes, dès
lors que la motivation pour le travail découvrira le digne
intérêt et le désir de richesse le vrai bien.
C : - En quittant le marché
chrématistique, cause de déchéance de la
civilisation à production d'argent, les Humanites s'inventeront
leur table à valeur pour pouvoir se conformer à
ce qu'il faut et éliminer ce qu'il ne faut pas ou plus.
Pendant que les Humanites se prévaudront ainsi de moyens
simplifiés pour se débarrasser moralement de la
soif de richesse, les Chrématos continueront d'en faire
un but toujours plus indigne.
T : - Comme sur la table
à valeur, le travail personnel sera évalué
en soi, en qualité d'acte concret, et non pas arbitrairement
par son caractère différencié ou dit social,
c'est sa valeur nominative individuelle qui sera signifiée
abstraite.
P : - Et comme sur cette
table le produit d'un travail s'évaluera oeuvre concrète,
même s'il est de caractère social, impersonnel;
seule sa valeur nominative spécifique sera signifiée
concrète.
A : - Et puisque l'argent
finira de remplir un rôle déterminant en fonction
conditionnelle, et deviendra exclusivement un moyen d'échange,
caractérisé d'un simple numéro, il facilitera
l'achat au détail. La vente en gros se fera avantageusement
par un troc quantitatif direct entre objets ou services, sans
intervention monétaire. L'argent ne sera plus cet instrument
de la commensurabilité valorisante d'une marchandise ou/et
d'un labeur intégré.
C : - Rendue caduque,
la valeur marchande, génératrice d'un profit, sera
abolie et en même temps ses forces motrices disparaîtront
: les rapports quantiques, principalement celui de l'offre à
la demande, comme celui issu du scrutin électoral qui
subsistera, mais ni majorité ni unanimité ne pourront
valider leur suffrage en ce scrutin seul. L'économie retrouvera
son sens propre originel qui ne pourvoira plus une masse d'emplois
parasitaires, bureaucratiques, ou socialement inutiles.
P : - Les besoins courants
des transports, de l'administration, de l'éducation, de
la santé, de l'information, pourront naturellement se
rendre gratuits. Les dépenses pour ces oeuvres publiques
n'auront nulle raison d'être récupérées
par ailleurs, quand la société aura l'honorable
tâche de gérer la répartition d'un capital
monétaire virtuel et non plus produit mais instauré
de plein droit, de pouvoir du citoyen. Taxes et impôts
seront devenus inutiles, extirpés de la vie, de même
que tant d'autres soucis et maux trop longtemps accumulés
avec du capital généré par du travail. Seule
la séparation de valeur entre travail et produit aura
pu entraîner la scission de leur fonction de marchandise,
le divorce entre travail et capital.
T : - Parce que le travail
est par nature indépendant de son produit en fin d'activité,
aprés le processus de la réalisation de l'un par
l'autre. Alors seulement, ce fait une fois admis, tout travail
sera distingué et pourra être rémunéré
intégralement, sans laisser de profit, selon une valeur
à définition abstraite du premier degré.
P : - Et le produit, ainsi
détaché du travail, pourra être vendu à
sa propre valeur à définition concrète.
A : - De même que
la monnaie, considérée indépendante aussi,
neutre par rapport aux deux autres types de valeur, recevra une
valeur spécifique, à définition abstraite
du deuxième degré.
C : - Les Humanites se
constitueront ainsi deux catégories d'échange,
abstraite et concrète, en trois types de valeur, différenciés.
Elles seront fondées sur le principe qu'un produit de
création qui s'affirme est du travail transformé
et nié à la manière d'un être nouveau
provenant d'une métamorphose. Selon ce principe l'argent
ne fait pas naturellement objet de production, le travail ne
caractérise alors qu'une action et l'argent qu'une fonction,
et leur identité respective se transmet logiquement mais
non par réciproque substitution - comme lors d'un marché
courant. La table à valeur permettra de restituer cette
authenticité des valeurs, de rétablir l'identité
de toute chose.
P : - Pour ce faire, que
contiendra la table à valeur ?
C : Elle fera le barème
caractérisant tous les critères indispensables
à l'évaluation objective, à l'expression
d'équité, à l'unification des mille raisons,
à la mise en oeuvre de l'unique raison. Le travail d'une
part, le produit d'autre part, et tout système de signalisation
(dissemblables signes d'échange et de communication, dont
l'argent et aussi les mots), également à part,
devront être authentifiés selon le principe d'identité
de la logique.
A : - Ni dans le langage
qui est le moyen commun de la communication entre êtres
humains, ni par l'argent qui est le moyen commun de l'échange
avec les choses, les mots n'aliéneront plus ce qu'ils
nomment, les sommes n'altéreront plus ce qu'elles chiffrent.
T : - Le critère
du quantum sera égalisé à côté
d'autres critères : ceux d'utilité, de capacité,
d'éthique, d'esthétique, etc., figureront sur la
table; tous les critères possibles, prédicables.
Ils formeront un code d'évaluation destiné à
l'expertise indiscutable de toute chose, de la force de travail
à ses oeuvres et pour toutes les créations naturelles,
même. L'on passera ainsi des jugements subjectifs, porteurs
d'erreurs et de fautes humaines, à ce principe du jugement
objectif, dans le but de contenir et dans l'espoir d'éliminer
les préjugés.
C : - Soumis à
ces critères, le travail s'évaluera en soi, selon
la force, l'aptitude, le mérite, etc., en sus de la qualification.
A travail égal, effort différent, et compétence
démontrée, l'ouvrage de la personne physiquement
faible ou de métier moins qualifié pourra être
bonifié, par rapport aux possibilités d'autrui.
La table fera éviter toute confusion entre valeur du travail
et valeur du produit. Les choses seront évaluées
en fonction de critères qui leur conviennent spécifiquement,
à l'exclusion de ceux qui ne conviennent qu'à d'autres.
Dans tous les cas de figure, le principe d'identité sera
fondé d'application, et non plus le principe du substitut
d'identité.
P : - Et comment évaluera-t-on,
plus précisément, au moyen de la table à
valeur ?
C : - Il faudra d'abord
sélectionner les seuls critères convenant à
la chose à évaluer, mais sans en omettre aucun
en cette liste. Il est évident que si la table contient
tous les critères imaginables, d'une chose à l'autre,
ils peuvent ne pas être de même nombre, d'égale
proportion, ou de genre semblable. Plus l'objet d'évaluation
sera parfait et plus il y aura de critères prédicables;
la richesse réelle dépendant de la variété
des faces à mettre en valeur.
A : - Chaque critère
étant nanti d'un même nombre fixe de points, prévu
avec ou sans coefficient, selon son importance.
T : - L'on attribuera
à la chose le nombre de points requis d'après chaque
critère adéquat, selon ceux seuls sélectionnés
convenant.
C : - C'est ainsi seulement
que la raison de l'homme pourra se rendre objective, intègre,
parce qu'elle sera elle-même soumise au crible de la table
à valeur qui établira un jugement extérieur,
impartial, neutre, et nécessairement objectif. Tout se
posera sur cette table et elle fera aussi figure de témoin
matériel en cas d'erreur. La table sera le moyen pour
la raison de se rendre majeure, de s'ériger au-dessus
de tous les autres systèmes et objets d'ordination, d'offrir
à toute raison mineure la place assise qu'elle mérite,
la conduite qui l'honore, indépendamment de la conscience
de personne.
A : - Afin que l'individu
humain ne regrette pas l'absence d'un meilleur jugement que le
sien ou ne soit plus tenté de se substituer à la
justice d'un dieu, prétextant de son inexistence. La foi,
l'opinion partiale, l'intime conviction, l'autorité, la
force d'un groupe ou d'un suffrage, le désir d'argent,
le pouvoir par la volonté ou la richesse vénale
et autre, se révéleront tous pareillement inconvenants.
P : - Oui, l'instrument
créé par l'homme deviendra meilleur arbitre que
son créateur. Ainsi donc, aucun partenaire d'échange
ou de communication ne pourra plus être dominant, ou influent,
ni corrupteur. La table à valeur permettra le rendu d'un
jugement digital, la prise en mains propres du règlement
de tous les comptes, la vérification de toutes les opérations
qui ne relèvent pas d'un nombre, notamment des mandats
de raison exposés.
T : - L'ère de
la raison ouvrira ce paradigme qualifiant en fermant le paradigme
quantifiant de la fin du deuxième millénaire. Le
besoin de vérité rendra la table à valeur
universelle et sa mise en oeuvre par l'informatique deviendra
facile, lui permettant d'entrer en chaque demeure, en plein de
poches, à travers tout ordinateur, à l'intérieur
de multiples pays.
C : - Tout se soumettra
aux critères de la table, y compris les idées,
les pensées, chaque fois qu'elles s'avèreront neuves,
en qualité d'invention; et naîtra la vraie démocratie
passant au crible toute conception politique; et seul moyen de
savoir si celle-ci apparaît à priori juste ou bien
fausse (L'expérience ou la pratique existentielle est
une perte de temps, une épreuve incertaine, peu probante,
historiquement le plus souvent décevante, mais déterminante
: alors autant la préparer avec raison). Une politique
à suffrage minoritaire pourra espérer prendre la
mesure de sa raison en se faisant agréer et, inversement,
une politique à suffrage majoritaire pourra être
invalidée. Toute prétention de supériorité,
de pouvoir ne se voulant reposer que sur la force d'une somme
ou d'un quelconque nombre, et qu'importe le genre, se verra rabaissée.
Toute quantité faiseuse de crédibilité devra
se replier en l'unité, à un point final.
T : - Le droit politique
(plus du tout formel comme l'auront été "les
droits de l'homme") pourra alors être confié
au citoyen en personne responsable et libre par devoir associé.
La table à valeur sera, à cet effet, d'usage partout,
pour tout, et par tous, laquelle engagera à y déposer
sa pensée, pour en vérifier la raison. Le citoyen
aura la responsabilité de proposer, par mandat de raison,
ce qui contribuera à l'amélioration de l'organisation
de la société, en tout domaine public et privé
- dès qu'il n'y aura plus d'anciennes valeurs récurrentes.
C : - Pas de chaises vides
à l'entour de la table à valeur installée
sur ordinateur, nul privilège (délégué,
représentant, élu, mandaté de corps) pour
s'y asseoir : c'est l'esprit, la pensée gouvernée
par la raison, qui en seront les mandants. Et l'on n'aura plus
besoin de "raison d'Etat" au-dessus de l'esprit, ni
d'opinion du nombre au-dessus du genre. La raison est comme du
sang, elle circule rouge pour tous et sa conduite dépend
de chacun.
P : - Les biens mobiliers
matériels et immobiliers privés pourront être
cédés nominativement du vivant de propriétaire,
sans post-obligation familiale, sinon pour les choses justifiant
une raison sentimentale indivisible ou acquises en communauté.
A : - La monnaie d'échange
sera entièrement informatisée, en termes de monétique,
en comptes chiffrés nécessairement vérifiables
en lecture par tout le monde mais protégés, inaccessibles
hors opération de consommation ou de paiement.
C : - De mémoire
d'Humanites, l'informatique aura été à la
disposition des hommes avant qu'ils aient été dignes
de l'employer, affectée à la gestion lucrative
d'intérêts contingents, au traitement bureaucratique,
à la circulation monétaire, mise au service de
la débauche du travail; employée à la médiatisation
ludique et distractive, à combler l'ennui, la misère
politique ou sexuelle, à meubler la décadence marchande
de la fin d'ère des Chrématos.
A : - Maintenant, de l'argent,
autant qu'il en faut, autant que besoin est, pourra être
confié à l'initiative individuelle et au groupe,
pour la création, pour toute oeuvre utile. Le nécessaire,
le besoin, la qualité de l'objectif matériel ou
intellectuel voulu déterminera sa réalisation.
L'argent limité et réservé à l'opération
d'échange fera sa noble et seule condition d'existence.
L'échange accompli, en vente contre achat, par cette monnaie
de gage, effacera la somme dépensée de la provision
du capital appartenant à l'intéressé. Aucun
compte "courant" ne grossira du fait d'échange.
Il ne pourra qu'être débité dans ce cas,
et seulement crédité comme fruit d'un travail.
On attribuera une haute responsabilité au fait de consommation
d'un argent concédé de droit civique et non plus
"gagné" d'un labeur exploité ou détourné
d'un capital accumulé, quand la production de l'argent
aura cessé d'exister.
C : - La vraie démocratie
prendra alors vigueur grâce à l'étude de
mandat de raison apporté par le citoyen. Ces mandats seront
traités sur table à valeur en vue d'en sélectionner
les sujets nouveaux, innovants, intéressants, proposés
à la communauté. Tous les citoyens auront le devoir
de s'associer en comités de raison, à partir du
quartier, du village, de la cité, comme de la ville, puis
de la nation, et de la Terre même, avec la volonté
de trouver et d'apporter, à ces différents niveaux,
solution à leurs problèmes.
T : - Alors que les Chrématos
continueront d'asseoir le travail autour de la table étroite
du capital, à discuter cyniquement de la méthode
à employer pour une ultime division de l'un par suite
de la production toujours plus difficile et plus absurde de l'autre,
les Humanites auront su rester à distance de cette dernière
tentation de malins.
Peuple Chrématos,
une fois détaché du travail, en bordure d'une grève
du capital, au devant d'une mer généreuse, tu trouveras
à lire des valeurs neuves, gravées d'un antique
silex sur une table en pierre. Venu marcher sur une plage de
sable devenu cet étalon de référence nommé
"sablon", tu apprendras à connaître la
sagesse des Humanites, le reflux océanique de la liquidité
bancaire. Et tu en puiseras à pleines mains en signe d'abondance,
d'équivalent universel de tout échange. Mais il
te faudra surtout méditer ces adages austères marquant
la fin de règne du Veau d'or :
" Une circulation automobile
reposa sur un moteur à explosion d'un fluide composé
d'air et d'essence. L'énergie principale, le carburant,
eut un coût d'usage; l'énergie secondaire, le comburant,
fut gratuite - l'atmosphère étant une denrée
invisible et profuse. D'un médiocre rendement, ce mécanisme
passa néanmoins pour économique.
Le capitalisme fut une sorte
de véhicule homologué en ce sens, quand les passagers
durent produire l'énergie pour circuler, le carburant
en terme de profit et le comburant en terme de salaire. Ils eurent
fort à peiner pour réaliser cet argent. Afin de
pouvoir rouler les passagers à l'aller, ces deux éléments
restèrent mélangés. On les décomposa
seulement au retour, pour payer l'effort. Le conducteur retint
à lui seul un profit.
Par conséquent, cette
conduite de transport en commun dut se mouvoir de fonctions inégales,
injustes, nuisibles, superflues, aberrantes. Le capital monétaire
parut d'essence riche ; la force de travail eut l'air pauvre.
Ce marché n'eut donc absolument rien d'économique.
La valeur créée
n'en avait aucune. "
" Toute oeuvre se réalisa
en un temps de travail. Oeuvre et travail se confondirent par
nature et se divisèrent logiquement, aussitôt accomplis.
Oeuvre et travail ne firent ainsi d'abord qu'un. Puis l'oeuvre
se sépara, devint produit : travail et produit firent
alors deux. Le travail et l'oeuvre se consommèrent en
même temps; le produit en un autre temps, après.
Par conséquent, ce
ne fut pas naturel, point normal ni moral, que le marché
des produits dût rapporter un bénéfice du
travail nié dans le produit, réglé par un
salaire. La marchandise en laquelle le travail se transporta
dut se déclarer, de ce fait, comme nulle et non avenue,
même si parvenue.
Le produit ignorait sa valeur.
"
" Le travail rapporta
de moins en moins, l'argent rapporta de plus en plus. Il fallut
investir là où les salaires furent les plus bas
pour produire des biens, là où l'intérêt
fut le plus haut pour produire de l'argent. Le rendement indirect
du capital se dégrada par rapport à son rendement
direct qui regrada. Travail et capital s'éloignèrent
l'un de l'autre.
Par conséquent, faire
de l'argent avec du beurre ou du beurre avec de l'argent fut
chose qui - quoique difficile à voir et à croire
alors - s'acheva et, en tous cas pendant ce temps, resta absurde.
Le travail perdait sa valeur.
"
" Le temps se divisa
en heures, le travail en quantités, le pouvoir en suffrages.
Et l'heure, la quantité, le suffrage - offres et demandes
incluses- , purent s'attribuer à l'égal comme à
l'inégal. Ils permirent le partage en sens contraire,
en deux poids deux mesures. Aucun instrument - montre, valeur,
monnaie, prix, urne, facture, parlement, etc. - étalonné
par ces autres, n'alla indiquer juste.
Par conséquent, le
temps perdu, le travail ingratifié, la servitude quotidienne,
la coulée riveraine, se sous-évaluèrent
massivement.
Le vécu et la beauté
se cherchaient leur valeur. "
Toute valeur est sujet de jugement
humain. Le choix du type de table est objet facultatif. La table
à la règle maligne sur laquelle se négocie
la force de travail, toute marchandise, au jeu de la chrématistique
- ou l'autre : la table à valeur...
Si l'homme se montrait incompétent
à faire cet échange... de table nécessaire;
si pour vivre bien, son existence devait continuer par se consumer
à un développement d'enfer; si pour avoir, il fallait
éternellement prendre; si le travail ne pouvait que se
rendre au capital produit; si pour construire de l'artificiel,
il fallait détruire encore plus le naturel : il est certain
que le jour viendrait où même le vent solaire ne
prendrait point la peine de souffler mot de lui.
Marcel Wittmann - 1989-1992-1998
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