L' exclusion


Avec la réputation d'avoir été inclus
Dans un petit nombre de meneurs
Déjà cela suffit pour se sentir exclu
Parmi la masse des suiveurs
Depuis que le cri de ma naissance
Se poursuivit en manifeste de la différence
Jusqu'à ce que du "valium" calme cette ardeur
Remplace ma pipe et autres plaisirs
Il me faut désormais choisir
Entre tout dire et ménager le coeur.

On a assez de vertu pour cacher le vice
L'on paie le prix qui occulte la valeur
Personne ne veut saisir le sacrifice
D'un corps mis en pot de fleur
D'une plante à ne pas mettre ensemble
Parce qu'à aucune autre elle ne ressemble
Malgré les soins apportés à sa vie
Sous la lumière que projette l'esprit
Tous les gens suffisants se font rouler
Lui seul ne marche plus pour vivre
Même s'il le voulait
Comment pourrait-il les suivre ?

Et cet autre sur la route de l'indépendance
Embrassant un arbre à défaut d'amour
Finissant en fauteuil roulant par malchance
Là où l'on nous conduira tous un jour
Ramassés à bord d'une artère du pays
Ou gisant dans le coma avec une hémorragie
Après le travail avant le stop
Sous des regards posés sur du sang répandu
Le mouchoir à larme en prime psychotrope
A la vue de corps dans un virage étendus.

Qu'une souffrance cérébrale gauche d'hier
Sur ma jambe droite se libère
N'ayant plus rien à perdre ni à gagner
Toutes mes dents déjà arrachées
Poils poussant où je n'ai besoin de peigne
Du nez aux oreilles pour me rendre vieux
Afin que je pose devant la croix
Et qu'enfin l'on me plaigne
Alors que j'exige simplement ce droit
De la part des hommes bon Dieu
La considération de la différence
Sans échanger ma souffrance.

Exclue l'authentique démocratie
Qui apporterait le meilleur choix
Mais que veulent tous les partis
Lors d'élection d'une majorité de voix
Au supermarché du suffrage universel
Où l'on ne consomme d'idée personnelle ?
Mais la représentation d'en bas
Par sélection négative d'en haut va !

Intrinsèque aux choses est toute valeur
Ne repose pas sur l'offre ni sur la demande
Sur aucun nombre venant d'extérieur
Point crédible la quantique - la marchande
Comme les abstentions rien ne comptant
Se pourrait que votent une fois les morts
Qu'aveugle fasse la clarté au voyant
Qu'un seul ait raison tout le monde a tort
Mais toutes les oreilles ne s'en doutent
Il n'y a que des sourds qui écoutent.

Il arrive qu'un océan exclue les siens
Que le vent s'emporte et brise le mât
Déchire les voiles engloutisse les biens
Même si jetés à la mer par-dessus bord
Les corps ne baissent pas les bras
Ne leur en veulent pas et assument ce sort
Les éléments ne sont pas en faute de peine
Les hommes sont seuls à devoir faire face
Chacun contre tous comme à soi-même
A se porter des coups par derrière
Ote-toi de là que je prenne ta place
Disent-ils entre eux et ce sont des frères
Nul n'est à l'abri de l'exclusion de l'autre
Jalousant le riche par envie de pauvre.

Comme cela toute dépendance asservit
Et voici comment révolution se trahit
Si la fille que je connais
Respire assistée chaque nuit
Tous les salariés sous apnée
Sont déjà pompés avant midi
Le comble est que dès le petit matin
L’air se recharge sous pression
A plusieurs atmosphères de travail
Que des banques transforment en capital
Chômer n'est-ce pas souffler enfin
En finir avec la production
Inutile de l'argent sans fin
Chantée sur un air d'exclusion ?


Le vieux millénaire finit bientôt
Et commencera un millénaire nouveau
Avec la charnière de l'un à l'autre usée
Même la porte d'entrée est à remplacer
Travail de Marie, Jacques ou Jacqueline
Se trouve exclu par celui de la machine
Ils apprennent le métier de chômeur
Au mieux balayeur de logiciel
A l'entrée de paradis artificiels
En sortie d'écran d'ordinateur.

Oh les filles eh les garçons
Mais n'écoutez plus les illusions
Découvrez un autre monde à inventer
Ouvrez grand des portes sans serrures
Les fenêtres fermées sur la liberté
Et placardez sur vos quatre murs

Toutes les idées sont insensées
Il faut une autre pensée !

1995